Portrait d'Olivier Clanchin, président d'Olga
En avril dernier, le groupe Triballat-Noyal a été rebaptisé Olga, du prénom de la grand-mère d’Olivier Clanchin. En hommage évident à la fondatrice de la société et une évolution qui incarne la profonde humanité de cette société pionnière du bio en France. Rencontre avec son président.
Le ton est doux et tempéré, à l’image du climat breton, et chaque mot est parfaitement soupesé. Olivier Clanchin nous reçoit, à Noyal-sur-Vilaine près de Rennes (35), au siège du groupe familial rebaptisé Olga en avril dernier. Au cours de l’entretien, le dirigeant prend le temps de rechercher la position la plus équilibrée possible. Un état d’esprit que l’on retrouve dans la répartition des activités des 18 sites de production installés partout sur le territoire. Le chiffre d’affaires de 330 millions d'euros se répartit à parts égales entre la bio et le conventionnel, l’animal et le végétal, la grande distribution française et les autres circuits…
Dans les pas d'Olga
Le bureau où nous conversons est l’ancienne salle à manger de son enfance. Tout un symbole ! Résolument tourné vers l’avenir, le dirigeant n’en est pas moins très ancré dans l’histoire familiale. « Dans une logique de continuité stimulante et épanouissante », souligne-t-il. En 1951, ses grands-parents, Maxime et Olga Triballat, quittent le Berry et rachètent une fromagerie près de Rennes. Mais en 1955, le grand-père décède. Olga lui succède à la tête de l’entreprise. La mère du dirigeant va détonner. Elle sera la première femme à ouvrir une école de laiterie. Puis sa fille cadette, Françoise, prendra les choses en main en 1964, année où elle se marie avec Jean Clanchin, lui-même issu du monde laitier. Olivier Clanchin naît deux ans plus tard.
Alors que Triballat-Noyal s’impose comme un pionnier de la bio dès 1975, Hubert Triballat, le frère d’Olga, développe son activité dans l’ultrafrais à Rians (18). « Les deux entreprises vont, un temps, allier leurs forces commerciales, avant de prendre leur autonomie complète en 1995 lorsque nous lançons la gamme Vrai en grande distribution. Mais dans la tête des clients et des consommateurs, il n’était pas toujours aisé de nous différencier », rappelle Olivier Clanchin.
Le changement de nom lui trottait dans la tête depuis longtemps. Un projet inconcevable pour sa mère, une Triballat dans l’âme. Le déclic est venu en mars 2021. Lors d’un groupe de travail dans le cadre de l’élaboration de la stratégie 2035, Solenn Douard, la directrice générale, propose le nom d’Olga. Immédiatement, c’est l’évidence. « Comme le nez au milieu de la figure ! », s'exclame le dirigeant. Lui n’a qu’une hâte : traverser la rue pour annoncer la nouvelle à sa mère. Mère et fils se tombent dans les bras.
De la tête, du cœur et des tripes
Le nouveau nom est acté. Non sans émotion. « Ma grand-mère avait une grande ouverture d’esprit. Elle était très discrète et avait beaucoup de respect et d’attachement aux gens », relate Olivier Clanchin. Ces valeurs irriguent plus que jamais le groupe. Un travail de fond a été mené pour se projeter à horizon 2035. Le dirigeant n’en fait pas étalage, mais l’on comprend qu’il a fait son propre cheminement. Sur sa table de chevet, le livre de Frédéric Lahoux « Reinventing organizations » l’a inspiré. Plus de Codir, ni de gouvernance centralisée. « L’organisation pyramidale n’est pas adaptée au monde de demain, devenu complexe et même chaotique », pointe-t-il. Olga a adopté un fonctionnement en business-units, avec des structures plus autonomes centrées autour des métiers et des expertises.
« Le nouveau mode de management donne plus de liberté, mais aussi plus de responsabilités aux collaborateurs. Le tout dans une logique de confiance, avec un droit à l’erreur », ajoute-t-il. De quoi laisser la possibilité à chacun de prendre sa place. Un programme de formations a été déployé, tourné vers l’intelligence collective et le co-développement. « On utilise beaucoup la tête en entreprise, mais pas assez le cœur et les tripes », poursuit-il. L’image du cœur incarne la relation aux autres. Quant aux tripes, c’est ce qui stimule l’engagement. En pionnier, le groupe s’est beaucoup impliqué dans la création du premier label bio. Après avoir construit une filière bretonne de lait de chèvre au début des années 80, les premiers yaourts au soja ont été lancés dès 1988 grâce au développement d’une filière française. Dans la même logique, le chanvre a été remis au goût du jour, en 2014.
Proximité et reconnexion au vivant
Quant aux difficultés de la bio, Olivier Clanchin les voit d’abord comme « la rançon du succès ». Le groupe prévoyait, avant la crise du Covid, une progression continue de l’activité bio. « Nous avons dû arrêter les conversions », regrette-t-il. Mais avec l’esprit positif qui le caractérise, il voit en cette crise « une opportunité collective pour bien repositionner les filières et réorganiser les métiers jusqu’au bout de l’offre produit ». Il vise en filigrane l’impact environnemental de ces produits bio venus de l’autre côté de la planète. Chez Olga, 95 % des ingrédients sont locaux, à travers des filières lait et végétales françaises. Son message est clair : pour traverser la tempête, la bio doit plus que jamais revenir à ses fondamentaux. Des racines qu’Olivier Clanchin n’a jamais perdues de vue. Et qui lui donnent des ailes.