Portrait
Didier et Baptise Cotte : de père en fils
En moins de 20 ans, l’enseigne est devenue incontournable dans le paysage de la distribution spécialisée. Après une année 2019 en demi-teinte, Didier et Baptise Cotte souhaitent relancer une dynamique de déploiement en misant notamment sur la synergie avec d'autres spécialistes.
Brié-et-Angonnes (38), nous sommes le 22 juillet. Circuits Bio a rendez-vous au siège de L’Eau Vive avec Didier Cotte, propriétaire de l’enseigne, et son fils Baptiste, directeur du développement. Didier Cotte a racheté L’Eau Vive en juillet 2000. La société comptait alors sept magasins et un fournil. 20 ans plus tard, le parc comprend près de 70 points de vente (dont une quarantaine de franchisés) et toujours le même fournil. Baptiste Cotte a rejoint l’aventure en 2010, à l’aube de ses 30 printemps, après avoir débuté sa carrière comme analyste financier.
De la chaux à la bio
Chez les Cotte, le travail est une affaire de famille depuis huit générations. Didier, septième de cette longue lignée, a brisé le cycle en revendant ses parts de l’entreprise familiale, spécialisée dans la chaux, pour embrasser la distribution de produits bio. En 2009, son fils, las des places financières, se met en quête d’un nouveau projet professionnel. ça tombe bien : L’Eau Vive vient tout juste de démarrer le recrutement de franchisés. La suite, on l’imagine sans peine.
« Tu voulais monter des bars à salade. Tu te souviens ? lance le père à son fils. Je lui ai dit mais attends… Il y a une franchise que tu connais bien, tu devrais t’y intéresser ». Le terrain est de toute façon balisé : voilà près de 10 ans que Baptiste Cotte est témoin de l’enthousiasme de son père sur les bienfaits de l’alimentation bio et sur son potentiel de développement. Le projet fait sens. Du sens, c’est précisément ce à quoi aspirait le jeune homme. « J’ai sauté sur l’occasion, se souvient-il. Une façon aussi d’apporter ma pierre au projet d’entreprise de mon père ». Chassez le naturel et il revient au galop…
Premiers pas en magasin
Travailler en famille n’est pas pour autant chose aisée. « La difficulté, explique Didier Cotte, fort de l’expérience vécue avec son propre père, c’est d’accorder la relation de père-fils qui relève de l’intime avec la relation professionnelle. C’est plus compliqué qu’il n’y paraît. La clé c’est de se parler et de bien séparer les deux sphères. Quand on est en réunion de famille, faut pas qu’on commence à parler boulot ». De toute évidence, les deux hommes ont su trouver le tempo au fil des années. Une matinée passée en leur compagnie suffit à se rendre compte de l’affection qu’ils se portent.
Baptiste Cotte fait ses premières armes à Courbevoie (92), le premier magasin de l’enseigne en région parisienne. « Je ne connaissais rien au métier. J’ai tout appris sur le tas. J’en ai bavé mais c’est une étape par laquelle il fallait passer ». Il occupera ce poste jusqu’en 2013, année où il rejoint les fonctions supports de l’entreprise au bureau de Lyon (69) afin d’apporter sa pierre au développement de l’enseigne. Le rythme d’ouvertures s’accélère alors aussi bien en magasins propres qu’en franchisés. Entre 2016 et mi-2018, L’Eau Vive lance un point de vente tous les mois.
En 2019, ses 66 magasins ont généré un chiffre d’affaires d’environ 130 millions d’euros en progression de 4 % par rapport à 2018. Un résultat qui dénote assez nettement avec les croissances à deux chiffres auxquelles l’enseigne était habituée. Et surtout, pour la première fois depuis que le dirigeant actuel est aux manettes, L’Eau Vive a dû fermer des magasins.
Baisse de croissance en 2019
Entre 2019 et 2020, sept points de vente, dont trois franchisés, ont baissé le rideau. Débarrassé des magasins qui plombaient son résultat, le parc est désormais assaini, assure le directeur du développement. L'année dernière, l'enseigne a enregistré un résultat de 137 millions d'euros. L’Eau Vive se fixe quatre à six ouvertures par an jusqu’en 2025. Echaudée par la mauvaise fortune de certains de ses franchisés, l’enseigne promet cependant d’être plus sélective dans le choix de ses candidats.
Cette volonté de relance ne relève pas de la simple incantation. Cela fait plusieurs mois que les équipes du siège ferraillent sur les fondamentaux de l’enseigne afin d’en assoir la solidité. Baptiste Cotte pointe notamment le travail réalisé sur l’outil informatique de gestion des flux logistiques qui sera pleinement opérationnel à la fin de l’année ou encore la réflexion menée en matière de stratégie d’achats et de pertinence de l’offre par les équipes de category manager.
L’évolution du concept est un autre axe important sur lequel L’Eau Vive entend appuyer son développement. L’enseigne qui dévoilera en septembre sa nouvelle signature prévoit de lancer dans ses futurs magasins en propre un espace de restauration rapide qui fera aussi office de rayon traiteur hors des périodes de service. Un format alternatif de magasins est par ailleurs à l’étude.
Vers de nouvelles synergies ?
Didier Cotte souhaite aller encore plus loin. Comment ? En proposant aux autres distributeurs spécialisés, qu’il s’agisse d’enseignes ou d’indépendants, de mutualiser les moyens. Le marché, largement atomisé, s’y prête estime-t-il. L’idée : « mettre en place des alliances en s’appuyant sur les facteurs clés de succès de chacun des partenaires ».
Fort d’une plateforme de 3 000 m2, Didier Cotte met en avant de possibles synergies sur l’approvisionnement et la logistique mais aussi en matière de conseils, d’animations en magasins ou encore de formation.
La spécificité de l’enseigne qui dispose d’un fournil et livre l’ensemble de ses points de vente avec du pain maison constitue un autre atout, selon son dirigeant. « C’est une bouteille que je lance à la mer, convient Didier Cotte qui est par ailleurs certain d’une chose : dans cinq ans, il n’y aura pas autant d’acteurs et de chaînes qu’il en existe aujourd’hui »