Reportage

Visite d'un magasin bio Rachelle-Béry au Québec

18 janvier 2023 - Audrey Guiller

La vente de produits biologiques ne cesse de croître au Québec. Au sein du réseau de magasins bio spécialisés, qui pèse 29 % du marché, il existe trois principales enseignes. Reportage chez l'une d'elles, Rachelle-Béry, qui existe depuis 40 ans.

Il y a quarante ans, la première épicerie Rachelle-Béry ouvrait ses portes à Montréal, au coin des rues Rachel et Berri. La démarche de proposer des produits biologiques, naturels ou locaux était alors avant-gardiste dans la métropole québécoise. Aujourd'hui, la chaîne compte douze points de vente dans le Grand Montréal et la pandémie n'a freiné ni leur fréquentation, ni leurs volumes de ventes.

En 2005, Rachelle-Béry a été acheté par le géant canadien Sobeys, grossiste alimentaire, qui possède aussi les supermarchés IGA. Depuis, cent « corners » Rachelle-Béry ont été créés dans les points de vente de l’enseigne de grande distribution. Dans ces espaces, on trouve des compléments alimentaires, des huiles essentielles ainsi que des cosmétiques naturels. Cette offre permet à la chaîne de magasins bio, jusque-là urbaine, de toucher une clientèle en région.

L’intégration à Sobeys a permis d’élargir les approvisionnements de Rachelle-Béry, lui a donné accès à des entrepôts où la logistique est automatisée et de plus grandes ressources d'investissements. A partir de là, l’enseigne s'est aussi engagée dans une démarche de certification Ecocert Canada (qui existe depuis 2000 seulement) pour garantir l'origine biologique des produits en rayon qui en portent la mention, ce qui n’était pas le cas auparavant. C’est ainsi que dans le magasin Rachelle-Béry de la rue Saint-Denis, ouvert voilà quatre ans en plein centre-ville, 70 % des produits proposés sont biologiques. Les autres sont locaux, issus de l'agriculture raisonnée ou « naturels », mais non certifiés.

Québec

  • A gauche, Caroline Deschâtelets, directrice du magasin, accompagnée de Carl Paquette, directeur des opérations
    Rachelle-Béry et IGA.

  • Cinq mois seulement de légumes locaux. La proportion de fruits et légumes issus de fermes distantes de moins de 50 km varie énormément selon la saison. Car les agriculteurs locaux ne produisent que de juin à octobre. Le magasin contacte directement les producteurs qui livrent, au jour le jour des volumes difficiles à prévoir. C'est un défi pouur l'équipe, plus habituée à gérer ses stocks depuis un seul entrepôt centralisé.

  • Des brumisateurs pour réduire les emballages. Pour proposer et garder frais les fruits et légumes non emballés l'enseigne avait l'habitude de les stocker dans des armoires réfrigérées et de les arroser quotidiennement. Rachelle-Béry a remplacé le système, trop énergivore, par des brumisateurs qui consomment peu d'eau.

  • Prix d'appel avec la marque maison. Depuis son intégration à Sobeys, Rachelle-Béry propose chaque semaine une circulaire en ligne sur les promotions proposées en magasin. L’enseigne commercialise par ailleurs « Compliments », la marque propre – exclusivement bio – des supermarchés IGA du groupe. Ses prix canons sont mis en avant dans tous les rayons du point de vente (ici l’épicerie salée).

  • Une large offre végé et végane. Ici, pas de rayon boucherie, charcuterie ni fromagerie à la coupe. Le rayon frais compte quelques produits en bocaux de verre consignés, comme du lait ou des sauces. Il se singularise surtout par une large section d'aliments végétariens et végans. Depuis 2019, les ventes de protéines végétales ont augmenté de 35 % au Québec, selon les producteurs de grains du Québec qui regroupe les différents acteurs de la filière.

  • Une petite cuisine sur place. Dans un atelier de 20 m2, des employés préparent des sandwichs, soupes et salades
    "prêts à manger". Les plats ne sont pas certifiés biologiques mais sont fabriqués à partir d'une liste, propre à la chaîne, qui exclut 140 produits interdits (conservateurs, colorants etc...).

  • Gestion maligne des invendus. Rachelle-Béry met à disposition les invendus de son entrepôt à la Transformerie, un organisme montréalais qui les transforme en sauces et confitures sous la marque Rescapés. Les pots, consignés, sont vendus en rayon. Quant aux produits proches de la péremption, ils sont proposés en rabais de 30 à 70 % sur l'appli FoodHero. Le consommateur commande en ligne et récupère son colis en magasin.

  • La boutique santé, coeur du magasin. Le rayon santé représente 20% des ventes du magasin de la rue Saint-Denis. On y trouve des compléments alimentaires, des vitamines, des huiles essentielles ou encore des cosmétiques. Une naturopathe, formée en interne dans l'Académie Rachelle-Béry, est présente en permanence pour apporter ses conseils aux clients.

  • L’hygiène et l'entretien en vrac. Depuis la pandémie, les fabricants conditionnent en sachets les produits d'épicerie qu'ils livraient habituellement en vrac. L'offre vrac se concentre donc actuellement autour de 24 références maison de shampooings, savons et produits d'entretien. Les clients ont aussi le choix d’acheter une bouteille de shampoing de la marque Oneka en rayon et de revenir la remplir à la station vrac de la marque une fois qu’elle a été vidée.

  • Des ateliers gratuits pour les clients. Dans un espace lumineux, le magasin propose une fois tous les trois mois des ateliers gratuits de deux heures sur la naturopathie, le zéro déchet ou encore la cuisine santé. Ils sont animés par des employés ou des associations invitées. Le reste du temps, les clients utilisent l'espace pour déjeuner.

Au Québec, la bio en pleine expansion
La vente de produits biologiques augmente d’environ 9 % par an depuis dix ans au Canada. Au Québec, la proportion de consommateurs qui mettent au moins 30 % de produits bio dans leur panier est passée de 11 % en 2011 à 32 % en 2022, selon Filière biologique du Québec, un organisme à but non lucratif, chargé de la concertation entre les principaux acteurs du secteur de l’agriculture biologique québécois. Les produits les plus vendus sont les fruits et les légumes frais. 45% des ventes de produits bios sont réalisées en supermarchés généralistes. Pour ces grandes surfaces, le bio représente 3 % du chiffre d'affaires. Les magasins spécialisés constituent le deuxième mode d’approvisionnement en bio des consommateurs (29 % des ventes), puis viennent la vente directe à la ferme ou sur les marchés (13 %) et les restaurants et traiteurs (12 %). On ne trouve des chaines de magasins spécialisés comme Rachelle-Béry qu’en milieu urbain. Outre la grande distribution, les deux principaux concurrents de l'enseigne sont Les Marchés Tau, qui comptent six boutiques (dans la région de Montréal) et Avril, une chaîne indépendante gérée par un couple, déployée sur huit succursales autour de Montréal et à Québec. A noter au sein de ce parc, l’ouverture en 2018 d’un magasin de 4 000 m2, employant 200 personnes. Loin des standards français…

Pour en savoir plus sur le marché des produits bio au Québec, consultez le numéro 13 de Circuits Bio (cliquez ici pour nos abonnés).