Non alimentaire : un rayon à remettre sur les rails

19 septembre 2023 - Magali MONNIER, Erwan Le Fur

Les ventes de produits hors alimentaires continuent de décrocher en magasin bio. Sollicité sur le sujet, Biocoop appelle le circuit spécialisé au sursaut. En s’appuyant notamment sur le dynamisme des politiques d’innovation mises en place par les fabricants.

« Les résultats se sont stabilisés au mois d’août, on verra bien ce qu’il en est du mois de septembre. La situation reste quand même fragile », rapporte Claire Devins secrétaire générale d’Ecodis, un grossiste spécialisé dans la distribution de produits non alimentaires (hygiène, cosmétique, maison, etc.).

C’est un fait : si le marché de la bio montre au global des signes encourageants de reprise (lire dans les colonnes de notre dernier numéro), le non alimentaire semble ne pas bénéficier de cette dynamique et continue de souffrir. « Sur ce rayon on est clairement dans le dur », rapporte ainsi Bertrand Pérot, directeur général du Grand Panier Bio. Même son de cloche chez Biocoop, La Vie Claire, Naturalia ou encore Satoriz.

La pharmacie comme relais de croissance

Les données de Biotopia Insight confirment ces propos (voir tableaux en fin de page). De juin 2022 à juin 2023, la part de marché du non alimentaire sur le total magasin (10,4 %) a reculé de 1,1 point par rapport à la même période l’année précédente et de 2,3 points par rapport à celle terminant en juin 2020. Maison et entretien, produits de santé… Tous les segments sont impactés. Exemple avec l’hygiène beauté qui a généré en 2022 un chiffre d’affaire de 185 M€ contre 257 M€ trois ans plus tôt (- 28 %).

La nouvelle marque de Léa Nature, exclusive au réseau des 22 000 pharmacies se compose de trois gammes essentielles : deux nettoyants, trois soins hydratants et trois anti-rides.

Au point que les marques sont de plus en plus nombreuses à se tourner vers les officines pour se donner de l’air. Dernier exemple en date avec le lancement par Léa Nature de la marque Essenka, exclusive au réseau officinal. Il faut dire que le circuit affiche une santé insolente. C’est vrai pour le secteur du complément alimentaire, ça l’est aussi pour celui de l’hygiène beauté (voir tableau ci-dessous).

Evolution des ventes des produits d’hygiène beauté en pharmacie par catégories. Source : IQVIA ; CAM 06/23 ; données présentées par Cosmébio le 15 septembre 2023

« Suite à la période de la covid où les français se rendaient beaucoup en pharmacie, certains produits ont bénéficié d’une forte visibilité en officine. De nouvelles habitudes d’achat se sont installées et elles risquent de durer si le réseau bio ne réagit pas », analyse Philippe Laratte, vice-président de la Maison de la bio, interrogé en marge de la conférence de présentation du salon Natexpo organisée ce mardi 19 septembre.

Le réseau spécialisé invité à reprendre la main

Pour Pierrick De Ronne, interrogé fin août, quelques jours avant sa démission de la présidence de Biocoop, il est temps d’endiguer l’hémorragie. Les spécialistes de la bio ont, selon lui, un véritable chantier à ouvrir afin de se réapproprier le sujet. En commençant par retravailler les gammes avec les fournisseurs pour définir une offre plus en adéquation avec les attentes des consommateurs.

Et le sociétaire d’Annonay (07) de rappeler que le rayon du non alimentaire est souvent un fort pourvoyeur de marge et peut à ce titre constituer un levier de croissance que les spécialistes auraient tort de ne pas (ré)activer.

Les fournisseurs, les laboratoires de compléments alimentaires notamment, de leur côté n’ont de cesse d’appeler les enseignes à investir plus massivement dans le conseil en magasin, par trop défaillant, estiment-ils, sur le réseau spécialisé bio. « Certains magasins ont transféré ou supprimé les compétences et les moyens alloués au conseil. Or, les consommateurs ont besoin d’être accompagnés, notamment sur certains marchés complexes comme celui des compléments alimentaires, insiste Philippe Laratte. Certains ont tendance à oublier que le conseil, le service et la proximité sont les gros avantages du réseau bio par rapport à la grande distribution ».

L’innovation au cœur de la stratégies des marques

Des différentes enquêtes que nous avons menées ces derniers mois un constat s’impose par ailleurs : en dépit de la crise, les fournisseurs de produits non alimentaires n’ont pas levé le pied du côté de l’offre et demeurent très actifs en matière d’innovation. Prenons les compléments alimentaires.

Dépoussiérer les anciennes formules ou proposer de nouvelles gammes offrant aux consommateurs plus de sensorialité est un axe fort de développement en cosmétique (lire notre récent dossier sur l’hygiène corporelle, Circuits Bio, N°17). Les acteurs ont aussi à cœur de répondre à la problématique prix ou encore de travailler sur l’éco conception des packs et le sourcing d’ingrédients produits localement.

Le laboratoire Thera Viva propose depuis quelques mois un nouveau complément alimentaire formulé afin de contribuer au confort des femmes tout au long du cycle menstruel.

Avec également la volonté de dynamiser certaines unités de besoin encore peu exploitées en magasin bio comme par exemple des produits destinés à la santé ou au bien-être des femmes.

Culottes menstruelles, compléments à visée antidouleur, produits d’hygiène intime… « De nombreuses jeunes marques accompagnent les femmes de la pré-adolescence jusqu’à la post ménopause. C’est un sujet qui concerne la moitié de la population, il était temps que ce segment sorte du bois », souligne Pascale Brousse, fondatrice de l’agence Trend Sourcing et consultante « Tendances » pour le salon Natexpo. Selon l’experte, les biorythmes féminins sont ainsi devenus le « nouvel eden du bien-être ».

Et à ceux qui pensaient que le glas de la cosmétique solide avait sonné, les fabricants l’affirment de concert : ils n’ont pas dit leur dernier mot. Notre sélection de produits au sein de la galerie des nouveautés proposée par Natexpo témoigne de ce dynamisme.

 

Le rayon non alimentaire en chiffres

Un chiffre d’affaires qui s’érode

 CA 2022Evol vs 2021PDM (total mag.)
Hygiène beauté185- 15 %5,0%
Maison entretien88- 20 %2,4%
Santé bien-être133- 15 %3,6%

 

Une catégorie qui pèse moins

 PDM* 2020PDM* 2021PDM* 2022PDM* 2023
Alimentaire87,3%88,1%88,5%89,6%
Hygiène beauté5,9%5,4%5,1%4,8%
Maison entretien2,9%2,8%2,5%2,3%
Santé bien-être3,9%3,8%3,9%3,3%

* CAM juin – Total magasin -

Source : Biotopia Insight